DE LA CHARPENTE DE NOTRE DAME DE PARIS

DE LA CHARPENTE DE NOTRE DAME DE PARIS

mai 4, 2019 Non Par admin

mise à jour du 18/06/2019

C’est article est le fruit de mon étude portant sur l’item suivant:

Et si l’on avait laissé brulé la toiture de la cathédrale Notre Dame de Paris?

Or cet étude nécessite une mise au point sur les notions de stabilité des maçonneries et de la charpente.

Je recherchais des photographies récentes de la « forêt de chênes », telle que la charpente des combles était surnommée.

Un site officiel me fournit les dites vues ( https://www.notredamedeparis.fr )

Une page est consacrée exclusivement à la charpente.

 

Suite à un article paru dans BATIACTU, je relevai l’affirmation suivante, attribuée à Frédéric Létoffé et Gilles de Laâge, les deux présidents du Groupement français des entreprises de restauration de Monuments Historiques.

« Notre-Dame est un jeu d’équilibre où la charpente bois participe, par son poids et son assemblage. Les matériaux et calculs de poussée du 13e siècle en tenaient compte« 

Or, cette affirmation venait heurter les réminiscences des apprentissages en ce domaine, à l’Ecole d’Architecture de Lille. Il me fallait me replonger dans le Dictionnaire Raisonné de l’architecture de Viollet Le Duc.

Heureusement, depuis 2016, l’édition originale a été publiée sur wikisource.org.

Dans le tome III, est abordé la notion de « CHARPENTE« . Je ne citerai ci après que la partie qui concerne les constructions de type « ogivales », catégorie de Notre Dame de Paris.

Il convient que nous rendions à nos lecteurs un compte exact de ce qui constitue la partie essentielle de la charpente de comble combinée avec le mode de la construction ogivale. Nous commencerons donc par l’assiette de ces combles sur les bahuts ou têtes de murs. 

Soit A (7) le bahut en pierre ; on pose deux sablières B B′ plutôt sur leur plat que carrées. C est l’entrait de la ferme-maîtresse assemblé à queues d’arondes dans les deux sablières, ainsi qu’il est indiqué en E E′ dans le plan, de façon à ce que l’entrait retienne les sablières poussées en dehors par les chevrons portant fermes. D est le patin ou blochet dans lequel s’assemble, à tenon et mortaise, le chevron portant fermes ; ce blochet s’entaille pour mordre les deux sablières et est ainsi retenu par elles. F est l’arbalétrier, G le chevron. Si l’espace entre les fermes-maîtresses est trop grand, ou si, à cause de la largeur du vaisseau à couvrir, on craint que les deux sablières ne viennent à rondir au milieu, sollicitées par la poussée des chevrons, deux pièces horizontales H sont posées entre ces sablières et reportent cette poussée sur les points E retenus fixes par les bouts des entraits. Des jambettes I viennent reporter une partie de la charge des arbalétriers ou chevrons sur l’extrémité intérieure des blochets et donnent de l’empattement aux grandes pièces inclinées. Souvent, dans les grandes charpentes, le pied des arbalétriers et chevrons s’assemble à deux tenons dans deux mortaises, ainsi que l’indique le détail K, afin d’éviter que la poussée ne s’exerce sur le champ très-étroit d’un seul tenon et aussi pour empêcher la torsion de ces pièces principales. Les jambettes sont également assemblées à tenons doubles dans les blochets et les entraits, et, de plus, ils sont toujours embrévés dans ces arbalétriers et chevrons, comme il est figuré en L. Quelquefois même, les arbalétriers et chevrons portent un renfort pour donner plus de prise à cet embrèvement, sans affamer le bois ; c’est ce renfort que figure le détail M. Les jambettes I sont ou verticales ou légèrement inclinées, ainsi que l’indique la fig. 7 ; dans cette dernière position, elles retiennent mieux la poussée du pied des chevrons ou arbalétriers. Du reste, plus les combles sont aigus, plus les jambettes se rapprochent de la verticale. Le moyen adopté pour asseoir les charpentes de combles bien connu, on comprendra facilement le système général admis par les architectes du commencement du xiiie siècle dans la construction de leurs grands combles.

Prenons donc comme exemple d’une des charpentes de combles les plus anciennes, celle du chœur de Notre-Dame de Paris ; nous aurons ainsi, dans un petit nombre de figures, des fermes ordinaires, des chevrons portant fermes et une croupe. La fig. 8 donne le plan de la croupe qui couvre le chevet. Les fermes-maîtresses sont accouplées. Le côté A du plan présente la projection horizontale des sablières et des entraits au-dessus du bahut ; le côté B, la projection horizontale de la première enrayure.

La fig. 9 est l’élévation de la ferme-maîtresse C de croupe. Dans cette élévation, on voit, au-dessous des grands arbalétriers E, deux sous-arbalétriers F. C’était là un moyen puissant pour maintenir le poinçon G dans son plan vertical et pour donner à la ferme une grande résistance. Le premier entrait retroussé Hs’assemble dans les arbalétriers, dans les sous-arbalétriers et dans le poinçon. Le second entrait retroussé I se compose de deux moises qui embrassent ces mêmes pièces. Le troisième entrait retroussé K s’assemble à tenon et mortaises dans le poinçon et dans les deux arbalétriers. L’entrait L est suspendu au poinçon, 1º par deux moises M et des clefs, 2º par deux paires de moises verticales N retenues de même par des clefs de bois sur les sous-arbalétriers et sur le premier entrait retroussé. Deux autres paires de moises O remplacent les jambettes et viennent serrer et réunir, au moyen de clefs, les arbalétriers avec l’entrait. Comme surcroît de précaution, et pour mieux asseoir l’entrait, des liens P reportent une partie du poids de cet entrait sur des poteaux adossés au bahut. Ces liens ne sauraient pousser les murs, car ils sont placés au droit des arcs-boutants extérieurs. La flexion des arbalétriers de cette ferme est donc arrêtée à intervalles égaux par les trois entraits retroussés, rendus rigides eux-mêmes par les sous-arbalétriers. La flexion de l’entrait est arrêtée par le poinçon, les deux paires de moises N et les liens P. Il n’y a donc aucune déformation à craindre dans le grand triangle composant la ferme.

 

Pour illustrer la particularité des liaisons charpente/maçonnerie, je terminerai par une vue issue du site officiel confirmant la présence de cet assemblage.

Cette vue a l’avantage de nous présenter la charpente en place, Il apparait que les « liens » décrits par Viollet Le Duc (P) reposent en effet sur l’arase maçonneries aménagée dans le bahut couronnant me mur gouttereau.

On comprend que l’ouvrage de charpente vient simplement reposer sur les bahuts des maçonneries périphériques, sans ajouter des poussées biaises.

CONCLUSION: il semble que l’ouvrage de charpente pourrait être retiré sans entrainer de déformé dans l’envoutement maçonné. De ce fait, la charpente ne participe pas à la stabilité de l’immeuble, mais uniquement à supporter la couverture afin de reconduire les intempéries. Par contre, les poussées latérales en cas de vents violents sont bien encaissées par les arc boutants.

Dès lors, je me reformule la question:

Aurait-on pu éviter d’arroser les voutes en se concentrant sur les parties maçonnées émergeant au dessus du niveau de la double sablière?

 

ajout du 18/06/2019 – vu sur LINKEDIN

Charpente de Notre-Dame : stop aux idées reçues !

18.06.2019, par

Après l’incendie qui a ravagé Notre-Dame le 15 avril dernier, Frédéric Épaud, spécialiste des charpentes médiévales, fait le point sur les contre-vérités qui ont circulé.

L’émotion suscitée par l’incendie de Notre-Dame retombée, de nombreux commentaires contradictoires ont circulé à propos de la charpente disparue, des bois qu’il fallait sécher plusieurs années pour être utilisés et des forêts entières qu’il fallait raser pour la construire ou la reconstruire. Il est donc utile de faire un état des connaissances sur la charpente et les bois utilisés à Notre-Dame au XIIIe siècle ainsi que sur les possibilités de reconstruire une charpente en bois selon les techniques en vigueur au Moyen Âge.

Lire la suite ici: https://lejournal.cnrs.fr/billets/charpente-de-notre-dame-stop-aux-idees-recues